Qu’arrive-t-il à Novak Djokovic’ C’est la question que se pose le milieu du tennis depuis bientôt un an. Il y a eu la décompression consécutive à sa victoire l’an dernier à Roland-Garros, des soucis personnels, des problèmes au coude. Rien qui ne se soigne ni ne passe avec le temps. Et pourtant, le malaise demeure. Djokovic ne gagne plus. Vendredi à Monte-Carlo, il a cédé en quart de finale face au Belge David Goffin, un adversaire qui ne lui avait pris jusqu’ici qu’un set en cinq confrontations.
Ce n’est pas comme si je n’avais pas eu ma chance; je l’ai eue, je ne l’ai pas saisie.
Déjà à la limite au tour précédent face à l’Espagnol Pablo Carreno-Busta, le Serbe a flanché après 2h35 de jeu. «Ça tourne quand je manque le double break en début de troisième set, commenta Novak Djokovic à chaud. Ce n’est pas comme si je n’avais pas eu ma chance; je l’ai eue, je ne l’ai pas saisie.»
Djokovic contre Goffin. Une sorte de derby, les deux joueurs habitent la Principauté. Une longue tradition dans le tennis masculin, malgré la concurrence de Genève et, plus récemment, de Dubaï. Mais l’époque n’est plus au glamour des années Vilas et Borg. Les résidents modernes sont là pour le boulot et s’ils succombent aux pièges de la jet-set, ils le payent souvent cher.
En panne de sensations
David Goffin, tête de série numéro 10, est l’homme qui monte lentement dans le tennis mondial. Le Belge, entré l’an dernier dans le top 10, est une sorte de «petit Djoko», endurant, mobile, accrocheur. Reste à savoir si son adversaire est le «grand Djoko». Le Serbe a perdu sa férocité sur les courts. Il a fini la saison très honorablement (finale à l’US Open et aux Masters) mais il ne gagne plus. La nuance est subtile mais à ce niveau de compétition, elle fait toute la différence.
Nous l’avions quitté sur une improbable élimination au deuxième tour de l’Open d’Australie, un tournoi où seul un Stan Wawrinka en feu l’avait battu (en 2014) ces six dernières années. Cette fois, c’était un 117e mondial, le Letton Denis Istomin. En Amérique du nord, il s’est fait sortir deux fois par les services de Nick Kyrgios, avant de déclarer forfait à Miami (douleurs au coude). Signe que ça ne va pas fort, il fut entre deux le seul joueur majeur à participer à deux tours de Coupe Davis, en panne de sensations et en recherche d’émotions.
Le début de match de David Goffin n’est pas exceptionnel. Mais il joue juste, attaque à bon escient, soutient parfaitement l’échange et se contente le plus souvent d’attendre la faute de Djokovic. Le Belge conclut la première manche sur une magnifique attaque décroisée (6-2 en 31 minutes). En face, le bilan de Djokovic est famélique. Deux breaks concédés, pas de balle de break en sa faveur. Il n’a jamais crié, ni brandi le poing, ni montré quoi que ce soit.
Dans la lumière dorée du soleil couchant
Mais Djokovic remporte le jeu suivant et semble enfin lancé dans ce match. Sur une défense côté coup droit, lui l’homme élastique se ratatine, il ricoche au lieu de glisser, lâche sa raquette et tombe assez lourdement sur la brique. Cette chute semble lui faire l’effet d’un électrochoc. Il sauve une balle de break à 1-1 30-40, ravit le service de Goffin derrière, se détache, conclut assez vite (6-3) puis breake d’entrée dans la dernière manche.
Il y a alors un court moment où les deux joueurs jouent très bien au même moment. Cela donne le premier grand match de la saison sur terre battue. A 3-2 30-30, Djokovic redevient l’homme caoutchouc et se désarticule pour placer, en bloquant son poignet, un passing de revers long de ligne qu’il fête dans une rage libératrice. On le croit retrouvé, et le match terminé, mais Goffin s’accroche jusqu’au bout. Djokovic sauve cinq balles de débreak dans ce même jeu, puis cède son service à 4-3. Le match se termine dans la lumière dorée du soleil couchant. A tour de rôle, le joueur adossé à la mer est aveuglé. C’est sublime et cruel. Le public est pour Goffin, qui concrétise sa cinquième balle de match.
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